Un nouveau projet d’Infirmiers de rue expérimente la présence d’animaux sur le terrain pour faciliter le contact avec les personnes sans-abri.

Comme vous l’avez sans doute déjà remarqué, il est fréquent que les personnes sans-abri soient accompagnées d’un chien en rue. Le Canidé a, en effet, beaucoup d’importance pour son maître : il lui apporte une protection, bien sûr, mais par sa présence il offre du réconfort et une affection qui allègent un peu la difficulté de vivre en rue.

Un jour, un de nos patients nous a parlé de son chien qu’il avait perdu il y a quelques années. Il se remémorait sa compagnie, qui lui avait apporté beaucoup de joie, et la petite bête lui manquait fortement.

L'histoire a retenu l'attention de notre collègue infirmière Gaëlle, qui apprécie elle-même la compagnie de Walter, son Jack Russell Terrier de sept ans. Ça lui a donné l'idée d'emmener Walter faire une promenade dans les bois avec un patient.

Un coup de foudre

La rencontre s’est déroulée à merveille. Il y a eu tout de suite un coup de foudre entre les deux. La forêt et la nature ont joué leur rôle apaisant, mais la présence de l’animal a permis d’aborder différents sujets de conversation de manière détendue, ce qui se serait avéré plus compliqué, voire impossible, dans d’autres circonstances.

Cette première expérience nous a ouvert les yeux sur le rôle que pouvait jouer un animal dans l’approche des personnes sans-abri. « Le chien est un media exceptionnel entre notre équipe et le patient. Il nous permet de fluidifier certaines discussions et permet aussi d’aborder des problématiques par d’autres angles. », explique Gaëlle. « C’est un être qui demande de l’attention et du soin. Les patients vont s’intéresser à lui et poser des questions comme : « Comment va-t-il ? Que mange-t-il ? ». Ce qui nous permettra de leurs poser ces questions également. C’est à ce moment-là que l’on va donc pouvoir créer le lien pour assurer le suivi de la personne. Pour celles et ceux qui, pour diverses raisons, ne parlent pas beaucoup, le chien peut aussi faciliter un échange. »

Un chien fait bouger

Depuis peu, Infirmiers de rue a officialisé ce nouveau projet qu’est la médiation par l’animal. Il s’agit d’une véritable aide pour approcher nos patients et les stimuler au physiquement et psychologiquement. En effet, nous avons remarqué qu’en donnant le chien en laisse quelques minutes à la personne, celle-ci va adopter une meilleure posture, elle va se redresser. En même temps, cela lui procure un sentiment de contrôle et de responsabilité, sentiment que nos patients ont souvent oublié depuis longtemps.

Walter, le chien

En plus, le chien apporte une réponse à une autre difficulté de nos patients en rue et en logement : la mise en mouvement. En effet, c’est un bon moyen de se mettre en action car il faut le promener, ce qui devrait convaincre la personne de bouger plus souvent.

Au niveau psychologique, l’impact est aussi visible quasiment instantanément : la personne passe de quelqu’un qui a (eu) des difficultés en rue et qui est suivie par Infirmiers de rue, à quelqu’un comme vous et moi qui promène son chien. « La personne passe du soigné au soignant. » toujours d’après Gaëlle.

Un chouette nouveau collègue

Jusqu’à présent, les rencontres entre Walter et les patients se sont toujours bien déroulées, sans réticences de la part de ces derniers. Les réactions diffèrent, mais ce qui ressort le plus, c’est qu’ils ont vraiment envie de prendre soin de l’animal. Ils veulent le caresser, lui donner à manger, savoir comment il va, etc. Parfois, la personne ne se rend même pas compte qu’elle est en train de caresser le chien. C’est quelque chose de naturellement déstressant.

Aujourd’hui, Walter fait partie intégrante de notre organisation. Ils va à la rencontre de nos patients, mais ça lui arrive aussi d’être présent dans les locaux d’Infirmiers de rue, pour le plus grand plaisir des employés.

Enfin, nous devons rester attentifs au bien-être animal, car les rencontres proposées à nos patients peuvent être considérées comme un travail. Il est donc important de ne pas en demander de trop et de prévoir des temps de repos.

Un chien diplômé

Pour développer ce projet, nous nous sommes appuyés sur une base théorique : ce que l’animal peut apporter dans le soin et comment nous pouvons emmener le chien dans notre environnement de travail, auquel il n’est pas habitué.

Pour le moment, nous travaillons avec un seul chien, qui n’a pas bénéficié d’un entraînement spécifique, mais avec son tempérament sociable et enjoué, Walter remplit déjà son rôle de médiateur. Dans les mois à venir, un deuxième chien fera partie de notre organisation. Celui-ci bénéficiera d’un dressage de base.
Par ailleurs, nous allons bientôt être accompagnés par plusieurs spécialistes, comme un comportementaliste, mais aussi une étudiante en école de médiation animale. Cette dernière va nous suivre pour évaluer le projet le plus objectivement possible. Enfin, nous allons également faire appel à un vétérinaire qui suivra nos chiens pour s’assurer qu’ils s’adaptent correctement aux différents environnements et n’absorbent pas trop les émotions auxquelles ils sont confrontés.
Bien sûr, nous ne mettons pas nos patients en contact avec des animaux sans préparation. Avant que le chien et les patients puissent faire connaissance, nous demandons la permission du patient, nous vérifions qu'il n'a pas peur des chiens et qu'il n'est pas allergique aux animaux.
Soutenez nous dans notre projet médiation par l'animal